Pourquois m’avoir habille en papillon
L’esprit doit demeurer immobile pour voir bouger le monde.
Lorsqu’une photographie fixe le monde, elle libère l’esprit.
Quand le choix du noir et blanc dépouille les scènes de leurs couleurs trop bruyante, il ouvre la voie du rêve.
Ces photographies sont comme des lucarnes nous dévoilant à la fois des pays éloignés et nos propres secrets.
Regards évocateur, sans fioriture, sur les vies quotidiennes en relation avec leurs environnements. Point de vue
privilégiant la tendresse, le plaisir, la beauté.
Naturellement, ces images suggèrent des mots.
Écrire à partir de ces photographies, c’est tenter de les inscrire dans l’univers intérieur qu’on devine au delà de l’images
Le thème de l’eau est celui du lien universel qui nous relie. L’eau n’est précieuse que parce que chacun d’entre nous est indispensable.
Circulant et adoptant toute les formes, elle est la métaphore de la compassion, de l’ouverture, des échanges…Elle réfléchi le ciel.
Je viens d’arriver à la gare de Bénarès, en pleine nuit, pour ne pas rater le lever du soleil sur le Gange.
J’ai mes plus beaux habits pour accueillir la lumière.
Ici, tout est signe. Une auréole, emblème de la conscience, transforme une porte banale en énigme.
Je suis pressée d’accompagner les pèlerins qui vont très sérieusement se baigner dans le fleuve pour honorer le jeu divin.
J’écrase mon nez contre la vitre pour voir encore plus loin, au-delà de la nuit.
Ce rond, au-dessus de moi, c’est le rien qui change tout.
Quand je verrai le cercle du soleil rajeunir l’éternité et embraser les gestes d’adoration, je serai saisie d’étonnement.
L’eau sera plus blanche que le jour, saturée de sens.
Malgré sa vigueur, l’éclat du matin contiendra une insondable obscurité, invisible retenue.
Pudeur du soleil aveuglant qui oblige à fermer les yeux.
Texte de Jean-Luc Coudray