Un Photographe journaliste en INDE
UN PHOTOGRAPHE JOURNALISTE EN INDE
Surprise, Surprise! Votre recherche internet vous emmènes en INDE alors que vous recherchez simplement votre photographe de mariage!
Ne cherchez plus! Vous l’avez trouvé! Fini les photos gnangnan en rang d’oignon avec le ouistiti ridicule. Un véritable photographe journaliste pour couvrir l’intégralité de votre reportage! En attendant de me contacter
Voici un de mes plus riche voyage, édité par Mango et disponible dans toute les bonnes librairies!
Vous trouverez ci joint des extraits d’un de mes livres en INDE, « A la recherche du temple des Singes »
Un voyage de plusieurs années sur cette terre d’émerveillement et de fascination.
Mes nombreuses collaborations Presse et Agence (GAMMA, SPOONER, BLACK-STAR)
m’ont très souvent offert la chance de parcourir l’Asie, encore aujourd’hui hui une terre que j’affectionne particulièrement.
Les textes et les photographies sont bien évidement déposé à la BNF et protégé par la législation en vigueur sur les droits d’auteur. Toute utilisation, même partiel est soumise à autorisation.
édito d’un photographe reporter
Visiter l’Inde demanderait toute une vie. Trop immense pour une simple approche touristique,
l’Inde, si vaste par ses dimensions, est démesurée par ses diversités culturelles, religieuses, ethniques..Ce pays de contraste, pauvre et généreux, offre, avec une égale abondance, végétations, palais, temples, civilisations et… des hommes, des femmes, des enfants. À mi-chemin entre une réalité sauvage de misère, de pollution, de bruit et une spiritualité religieuse de philosophie, de sacré, de mystère, l’Inde s’incarne, pour notre étonnement d’Occidental, des formes les plus baroques et les plus inattendues. En Inde, tout est possible, y compris l’impossible… et tout possible surgit n’importe où, n’importe quand, n’importe comment. Au fur et à mesure et dans le même temps, l’Inde propose tous les imprévus, toutes les péripéties, tous les chaos, tout l’inextricable en autant de pièces éparses pour se reconstituer en un fabuleux puzzle des plus aboutis. Notre regard de voyageur-voyeur peu à peu s’efface. Les couleurs vives de l’Inde s’estompent en toile de fond : le vieil or des saris des bonzes, le noir de la chevelure de Shiva, le vert des plantations de thé, le blanc de l’aube sur une plage de Goa, le jaune des taxis de Bombay… Le touriste disparaît, devient lui-même, pour comprendre, se taire et se révéler, dans le temple d’Hampi, en compagnie des singes – comme si on l’attendait depuis plus de trois mille ans -, puis pour repartir en y laissant à tout jamais un fragment de son âme. L’Inde n’est plus un pays, mais une partie de soi. Alors on peut faire sienne le cri de D. Paes : « Tout y était si magnifique que je m’y sentais comme dans un rêve. » E VOYAGES
Le GANGE photographié
Le Gange est un fleuve sacré, il s’écoule de la chevelure de Shiva et il est de bon augure pour un hindou de venir y mourir. Mais il y vient d’abord en pèlerinage. Quelques coutumes religieuses y ont cours : se faire décorer d’un point sur le front, s’immerger dans le Gange pour pratiquer des ablutions, être immolé ou satisfaire à toutes sortes d’activités mystiques, mais néanmoins nécessaires. Les rituels se pratiquent avec passion le long d’escaliers aux marches de géant qui bordent une rive du fleuve pendant sa traversée de la ville : les ghats.
Outre ses qualités métaphysiques, la rivière apporte l’eau nécessaire à la vie quotidienne et un peu de fraîcheur descendue tout droit des monts de l’Himalaya indien. « Ganga », le Gange : aussi volumineux que miséricordieux, sorte de sablier liquide peu pressé,
est inapte à l’atermoiement. Ses eaux ont de telles vertus hygiéniques que l’on s’en sert à la fois d’égout, de baignoire et de bénitier… Ici, pas vraiment de centre-ville, l’activité citadine est tendue vers la rive gauche du cours d’eau qui s’étire au ralenti d’un bout à l’autre de l’agglomération.
L’autre rive du large fleuve n’a pas la même allure – ni ghat, ni ancien palais de maharaja -, on distingue juste une étendue infertile et boueuse qui s’éloigne à l’infini. L’autre berge n’est pas sacrée, de fait elle n’est pratiquement pas habitée. Le territoire qui s’étend au-delà s’appelle « la plaine des voleurs ». Sauvage et inhospitalière, peuplée d’insectes repoussants et de bêtes peu courtoises, même les voleurs ne s’y risquent pas : ça ne serait vraiment pas bon pour le karma, m’a-t-on dit.
Située sur la rive gauche du Gang Bénarès est construite sur un promontoire
face au soleil levant..
De grands escaliers, les Ghats, donnent un accès direct au bord de l’eau pour la baignade ou pour les bûchers funéraires. Le Gange est vénéré comme une déesse vivante, une mère qui purifie spirituellement chaque personne qui se baigne dans ses eaux, en les lavant de leurs péchés.
- Bénarès est un agglomérat d’habitations multidimensionnelles à faire pâlir tous les urbanistes. Un agrégat exubérant imprégné de ce mélange d’humanité, d’humus animal, puant et bruyant, de pourriture sanctifiée, de vie et de mort intimement mêlées que l’on rencontre dans les cités les plus pauvres de la planète.
Heureusement, il y a le Gange purificateur avec ses ghats faits de larges dalles de pierre laiteuse, ses sorties d’égouts et sa multitude d’engins flottants amarrés les uns aux autres. C’est là que l’on fait le ménage z depuis ce matin. C’est ici que la ville puise –0 ses origines millénaires— Bénarès est une des plus anciennes cités du monde mais aussi trouve la régénération nécessaire à son fonctionnement spirituel et hygiénique. La température ne dépasse pas dix degrés à cette heure matinale. Féerique densité visuelle, depuis les saris portes par les femmes constellés de miroirs qui renvoient aux hommes leurs regards impurs, jusqu’à la peinture des portes d’entrée, les fresques dont certaines maisons sont décorées, sublimées par une lumière… pure, lumineuse, violente… et des ombres à rendre cauchemardeux le plus aguerri des photographes.Les habitants du quartier me connaissent désormais et beaucoup me saluent déjà chaleureusement : hochements de tête, mains jointes devant le ment on, mains portées sur l e cœur, devant l a bouc he… c’ e s t selon la religion. À se demander parfois s’il n’y en a pas une par habitant. D’autres, par un regard appuyé, me font comprendre que je ne suis pas le touriste lambda. Il est vrai que des voyageurs par ici, même si on en rencontre beaucoup tôt le matin alors que la chaleur est encore supportable, il y en a peu. Une infime minorité fréquente le vieux Bénarès, elle se cantonne en général à la seule visite de Manikarnika ghat, le ghat le plus ancien et le plus sacré. Les seuls que je croise dans le voisinage s’empressent de me demander leur route. J’en déduis qu’ils se sont perdus.
J’ai aussi quantité d’amis dans le quartier, ils me sautent parfois au cou ou s’accrochent à ma main dès qu’ils me rencontrent, ils me demandent de leur apprendre des mots en français et les oublient aussitôt. Le plus vieux doit avoir une douzaine d’années. Un peu moins ou un peu plus, il ne le sait pas lui-même — le rite des anniversaires avec gâteaux et bougies n’a pas cours par ici… À Bénarès, ville sainte parmi les villes saintes, les enfants des rues, angelots anonymes disséminés au hasard des rues, se partagent les mille petits boulots qui leur sont réservés : travaux trop peu rentables ou trop dangereux. Ces gosses issus des couches les plus indigentes ponctuent l’environnement urbain de leur présence juvénile avec simplicité et spontanéité. Fauchés mais souriants, lumineux mais modestes : ils ne connaissent ni l’angoisse du lendemain ni celle du temps qui passe. Leurs journées s’écoulent avec une fatalité rendue banale tant il n’existe que peu d’issues, à l’image des eaux chargées d’immondices charriées par le fleuve, ils se dirigent béatement vers un avenir inéluctable, delta aux ramifications variées et miséreuses d’une société généreuse mais incapable de donner ce qu’elle n’a pas. On dit qu’ils s’amusent d’un rien — ça tombe bien, ils n’ont rien. Chacun des gamins de mon quartier pourrait être le héros joyeux d’un compte d’Andersen moderne. Leurs stratégies de survie sont des fables pour enfants de pays riches. Il y a Avinesh, petit gardien de buffles… Sunita, petite vendeuse de thé… Estha, petite ramasseuse de bouses de vache… Kerran, vendeuse de bougies… et bien d’autres encore. Malgré les risques connus de contamination, la précarité de leur situation, les misères physiques, intellectuelles
Je repère la motopompe, abandonnée momentanément, moteur en route. La pompe aspire l’eau boueuse qu’elle recrache simultanément dans le fleuve au travers d’un gros tuyau de caoutchouc qui louvoie nerveusement. Il y a des bulles énormes, le moteur s’emballe, quelques pèlerins restent impassibles, un buffle s’amène en trottinant au milieu des parasols de jute et de paille des brahmanes. Des touristes passent au loin dans une sorte de bateau-mouche, certains ont des mouchoirs sur la bouche à cause des microbes. Il est six heures du matin, Bénarès, Inde : la journée ne fait que commencer.
La vidange des égouts est un travail extrêmement insalubre, il sera confié à de tous jeunes garçons, pas plus de dix ans. En échange de leurs services, ils recevront de quoi s’acheter à manger. Ni soin, ni considération, ni même hébergement pour ces enfants orphelins ou abandonnés qui vivent dans les rues. Ils vont passer les semaines qui viennent à charrier les boues en se faufilant dans la puanteur fétide d’un cloaque malodorant. Maladies de peau, bronchites chroniques, malnutrition, retard de croissance…
On est loin des accords internationaux concernant le travail des enfants. On pourrait penser à une forme d’exploitation. C’en est une. Sauf qu’ici, il n’y a pas de hiérarchie, la relation patron-ouvrier répond à des lois héréditaires et religieuses dont il ne viendrait à personne de trouver à redire. Là où on serait tenté de parler de classes sociales et de partage des richesses, cela se traduit en indien par échange réciproque. Difficile de comprendre que nettoyer la merde des autres puisse être un honneur, mais c’est comme ça! C’est la condition nécessaire pour accéder à un sort meilleur dans une vie future, donc bon pour le karma… et puis ça permettra de manger à midi.
- pourquoi les enfants travaillent-ils ?
Environ vingt millions d’enfants ne sont toujours pas scolarisés, dont une majorité de filles : 42 % d’entre elles fréquentent l’école primaire, contre 70 % des garçons. Deux facteurs expliquent cet état de fait : d’une part, la pauvreté – basses castes, paysans pauvres, urbains sans emplois ou mal payés et, d’autre part, le poids de la tradition – la faible valeur » sociale et économique des filles,
Ils sont deux arroseurs joyeux à diriger le tuyau vers le magma boueux qui recouvre les marches. C’est un bon job. Il commence à faire chaud maintenant et la vase rendue au fleuve libère tout un tas de trésors qui ont été charriés pendant les pluies: débris divers bouts de -matières plastiques, emballages, rares pièces de monnaies jetées en offrande l’an passé… ici, il y a belle lurette que l’on pratique le tri sélectif et la valorisation des déchets.
Plus loin, d’autres gamins chantent un remake de Frère Jacques ››, leur voix nous parvient depuis l’intérieur des égouts. La besogne avance. Le soleil monte dans te ciel. Le limon retourne au fleuve et la pierre rose nettoyée et mouillée renvoie une lumière.agressive. Il fait maintenant trente-cinq degrés e il n’y a pas un nuage.
Les égoutiers ne chantent plus, on aperçoit de temps en temps un bras maigre et las sortir du conduit et vider un seau dehors. Pendant ce temps, le responsable des opérations, le seul qui percevra un salaire à peu près déCent, enivré d’alcool synthétique, est affalé à l’ombre du mur d’un ancien palais de maharaja.
Il paraît qu’aux Indes (on dit encore les Indes par un vague réflexe colonisateur, comme on disait les Amériques avant l’invention du hamburger), dans certains quartiers des grandes cités, les pauvres dorment dans la rue, en famille, à même le sol sur de grands cartons d’emballages. C’est faux. Les pauvres en Inde n’ont même pas de carton, ils n’ont parfois pas de famille non plus, et les rues, n’en parlons pas. Les Indes, c’est bien simple, on n’en voudrait pas chez nous. Ou alors en photos couchées sur du papier glacé avec des commentaires lénifiants sur les vaches sacrées, les planches à clous et sur ces grands types à la peau cuivrée qui se baignent dans des fleuves peu ragoûtants pour se purifier l’âme…
Les castes sont partagées en deux groupes :
Les impurs, de la caste des intouchables. Considérés comme des sous-hommes, tous les métiers dégradants et salissants leur’ sont réservés : travail dans les mines, crémation des corps, tri ou ramassage d’ordures. Caste abolie sans succès par Ghandi qui ne tolérait pas la discrimination dont ils étaient victimes.
Images traditionnelles de l’Inde, à l’heure des embouteillages des écoliers, issus de familles « riches » et vêtus d’uniformes, sont conduits à l’école dans un rickshaw hors d’âge. D’autres enfants, hilares, analphabètes et crasseux,transportent du lait dans des seaux d’inox ou restent accroupis le long des murs, promenant un regard à la fois sombre mais lumineux d’un étonnement sans cesse renouvelé sur la vitalité exubérante de leur environnement. Les rues de New Delhi sont bruyantes et encombrées rickshaws, bicyclettes, motos, vaches et humains E produisent une vague sonore éthérée qui ondule dans la chaleur et la crasse.
Les Indiennes ont obtenu le droit de vote en 1930, bien avant les Françaises.
De nombreuses lois ont été adoptées pour améliorer leurs conditions de vie. Ainsi, une loi, votée en 1997, interdit le système de la dot. Pourtant, donner naissance à une fille est toujours considéré comme une charge : elle ira vivre dans sa belle-famille et la dot sera versée pour son mariage. Les Indiennes sont souvent illettrées. Pour remédier à cette situation et améliorer l’alphabétisation des jeunes filles, leur scolarité est gratuite les cinq premières années. Le taux d’alphabétisation des filles n’évolue que très lentement. Il est passé de 30 % en 1981 à 39 % en 1991. Pour les autorités indiennes, la scolarisation des garçons semble rester prioritaire.
Les signes apparents de la modernité et l’existence urbaine de ses habitants flirtent avec les témoignages d’époques ancestrales. La ville illustre à elle seule les paradoxes faits de modernité et de tradition d’un pays qui possède des réacteurs atomiques depuis 1957, installe des plates-formes offshore perfectionnées en mer d’Oman ou forme des ingénieurs informatiques ultra-performants, mais légifère pour instaurer une législation qui encadre le travail des éléphants et continue de laisser la priorité aux vaches, même si elles n’ont pas compris qu’il ne faut pas faire la sieste au milieu des rues.
En 1912, les Britanniques délaissent Calcutta pour transférer le siège du pouvoir à Delhi, qui retrouve alors brièvement sa place
historique dans la vie politique indienne. Mais en 1929, la jugeant insalubre, les Britanniques décident de construire une
nouvelle ville, New Delhi, au sud de la vieille ville. En 1931, ils inaugurent la cité administrative aux larges avenues et pouvant accueillir 65 000 fonctionnaires. Dès lors, New Delhi se développe rapidement, et aujourd’hui on lui attribue une population de plus de 12,5 millions d’habitants (avec une prévision à 21,6 millions en 2025).
Je roule vers le nord-ouest, cap sur Amritsar tout près de la frontière avec le Pakistan ; le train est indien, un vestige de l’Empire colonial à en juger par le pénible tchacatchac » des roues qui résonnent dans le wagon et le système de propulsion de la locomotive — la vapeur. Les Indiens achètent leurs billets en fonction de leur caste d’appartenance, les plus riches voyagent en première classe climatisée, les moins nantis s’installent sur le toit — les intouchables n’ont pas le droit de fréquenter les lieux des gens de castes supérieures. Je me contente du service ordinaire et de ses banquettes de bois ; c’est le plus surchargé. Un guidon de bicyclette dont le propriétaire m’envoie des sourires désarmant vient régulièrement heurter mes côtes. La poussière et la chaleur sont évidemment aussi du voyage Dans cette province du Pendjab, même si la majorité des habitants actuels est musulmane, c’est ici le berceau des sikhs, branche rebelle de l’hindouisme qui rejette le culte de la divinité, ne tolère ni sacrifices, ni rituels.
- Les Sikhs photographié par un journaliste
(littéralement : « ceux qui apprennent ») tentent de combiner en une seule foi le meilleur de l’Islam et de l’Hindouisme.Les fidèles les plus respectueux des enseignements de leur maître spirituel Guru Nânak respectent dans leur tenue le principe des cinq
les cheveux ne sont jamais coupés,
Kangh : ils sont proprement maintenus par un peigne de bois,
Kirpan :
Kara : le bracelet autour du bras qui tient l’épée,
Kacch : longues culottes.
Je visite les différents sites religieux de la ville. Quel que lJ soit l’objet des différentes dévotions, à proximité des édifices se ressent la même blancheur et le même apai?
- sèment, les architectes ont veillé à ce que la pierre participe à la spiritualité des lieux, qu’elle pénètre l’âme
- des hommes. On dit qu’il n’y a qu’un seul Dieu en haut
de la colline mais plusieurs chemins pour atteindre son sommet ; cette ambiance similaire de piété et de joie transmise par le culte que je rencontre partout serait?
- elle la preuve de la capacité des hommes à conjuguer
leurs croyances ? On dit aussi que la fabrication de la 413 coupole du Har Mandir Sahib, le temple d’or d’Amritsar,
a nécessité l’emploi de 400 tonnes d’or. Je me mêle 2 2 aux pèlerins sikhs et pénètre dans la fraîcheur relative
En novembre 1984, pour répliquer aux mesures répressives prises à
l’encontre des Sikhs dont le mécontentement provient
d’une partition de territoires
effectuée en 1947 lors de l’indépendance de l’Inde, deux d’entre eux, membres de la garde présidentielle, assassinent le Premier ministre : lndira Gandhi.
Des émeutes éclatent alors dans tout le Pendjab et font plusieurs milliers de victimes. Une situation proche de la guerre civile qui marque l’opposition historique entre les confessions .s k.hoest hindoue.
de l’édifice.
Les soieries brodées des visiteurs nombreux, le pacifisme et l’allégresse apparents des rapports humains, la sobre richesse des ornements confèrent à l’ensemble un goût de pureté élégante et de calme qui tranchent avec les villes que j’ai quittées. Difficile aussi de penser que nous sommes à quelques kilomètres d’une frontière entre deux pays parmi ceux qui se haïssent le plus au monde (même si, aujourd’hui, ces ennemis de longue date n’ont jamais été aussi près de ‹< normaliser » leurs rapports). Difficile aussi d’imaginer que ces lieux ont été le point de départ meurtrier (des centaines de pèlerins furent mitraillés par l’armée hindoue dans la piscine sacrée) d’une rébellion initiée par les sikhs et qui a fait des milliers de morts dans les années 1980.
• • • • •lotus, fleur des dieux ? Les racines du lotus plongent dans la glaise fangeuse des marécages pour s’épanouir à la surface en une corolle d’une pureté audacieuse. Le lac sacré de Pushkar est, dit-on, né d’un lotus que Brahma aurait laissé tomber des cieux. Une fleur tombée du ciel méritait bien un temple, celui-ci a été bâti sur ses rives : marbres, enluminures, colonnes ciselées…
On dit que les femmes du Rajasthan sont parmi les plus belles du monde. En tout cas les plus 3 élégantes. Leurs saris de coton aux assorti-–0 ments de couleurs audacieux sont copiés par la haute couture (Ritu Beri, originaire de New Delhi, vient de signer quelques collections du prêt-à-porter Scherrer) et leurs bijoux les accompagnent même dans les travaux les plus rudes. Nous sommes pourtant dans une région où il ne fait pas bon naître sous le sexe féminin. Même si les infanticides régressent (grâce à l’IVG après prédiction du sexe, légale en Inde depuis 1971) et même si la famine disparaît, l’arrivée d’une fille est davantage perçue comme une bouche ro inutile à nourrir et signifie le montant d’une dot
La vallée de Pushkar est renommée pour ses innombrables temples hindous s’échelonnant sur les rives du lac sacré. Chaque année, lors de la pleine lune du mois lunaire de Kartik (octobre-novembre), des milliers de fidèles hindous viennent rendre hommage au dieu Brahma, divinité de Pushkar. La nuit venue, les pèlerins se rendent sur les ghats les plus sacrés et se purifient s eaux gla
Je m’engage, suivi par quelques enfants curieux et silencieux, sur une route à une voie qui serpente jusqu’aux collines environnantes… le coucher du soleil sur les constructions blanches, le lac dans lequel se reflètent les façades rougies par le soleil couchant et le désert qui s’étend alentour confèrent une impression féerique. D’un temple éloigné parvient une musique traditionnelle, sitar et tabla, jouée par des musiciens que je devine concentrés et enturbannés. Contrairement aux apparences, la musique indienne n’a pas vocation à favoriser la méditation, elle s’écoute tout simplement comme du jazz, permet juste de s’envoler un instant, de savourer l’ambiance sirupeuse d’une soirée passée sur les hauteurs, le temps de griller un bidi (minuscule cigarette faite d’une simple feuille roulée) et d’avoir le sentiment qu’une fois dans sa vie on a pu jouir du temps arrêté.
Je décide de rejoindre Udaipur par le train de nuit. Mon billet de seconde en poche, je m’installe dans un compartiment avec trois hindous à l’élégance toujours marquée, cheveux impeccablement gominés et peignés, veste à col mao posée sur un gilet de laine à grosses mailles et une chemise qui semble sortir du repassage. Nous nous partageons les quatre couchettes aux draps blancs immaculés et puis, comme il n’y a pas de place pour s’asseoir, je fais comme eux, je me couche . avant même le départ, on m’invite avec insistance à prendre la couchette supérieure et je fais les remerciements d’usage avec fortes démonstrations gestuelles. Dans le compartiment où la chaleur est éprouvante, j’essaye de rester immobile, de calmer mon rythme cardiaque pour supporter la température du wagon de tôle chauffée au soleil toute la journée ; malgré tout, mon drap est rapidement ouillé de sueur.
Heureusement, le Chetak Express s’ébranle lentement et ‘,quitte la ville au pas. Il se lance ensuite à un bon 40 km/h à travers la campagne aride et buissonneuse, un vague filet d’air chaud du désert me parvient depuis la fenêtre et m’apporte tout juste de quoi respirer. La nuit est tombée, un lumignon tremblote au-dessus de ma tête, un coup d’oeil sur mes voisins et je me rends compte que la couchette du haut, située en aval de la marche du train, est la moins bien aérée — le vent fait bouger leurs draps, les miens sont comme plombés.
Photographe mariage Marseille et à Udaipur : « Cité de l’Aurore », « Venise de l’Orient », « Ville du lever de soleil », chaque guide touristique propose sa version. On y met surtout en avant le tournage du film de James Bond, Octopussy, en oubliant que Fritz Lang y a tourné Le tigre du Bengale et que l’industrie cinématographique indienne, la plus prolixe du monde, a bien dû y tourner quelques mélos dont elle a le secret. Mais l’essentiel de la cité n’est pas là, nous sommes dans le fief du plus haut dignitaire des Rajpoutes, le maharana Udai Singh. La ville apparaît délicate, fragile comme un coquillage ciselé par des doigts de fées, le romantisme des bâtiments couleur du sucre confine à l’enchantement… on la dit féminine — je confirme. Pas une fenêtre, pas un linteau qui ne portent la marque d’un orientalisme emprunt de religiosité : ici une fleur gravée, ici un trumeau encadré de deux colonnes incroyablement ouvragées, ici une représentation de Shiva, ici… de la dentelle ? Non, une simple balustrade de pierre sculptée. Chaque bâtisse, de la plus modeste à la plus extravagante, s’écrit en pleins et en déliés, le tout souligné finement à la règle avec une plume de colombe.
Après le calvaire du train, un peu de luxe ne nuit pas : conformément aux habitudes locales qui veulent qu’un riche ne se déplace surtout pas à pied, un taxi me dépose absolument au ras du perron du Jag Nivas.
Les Rajpoutes vivent dans le centre et dans le nord de l’Inde. Ils parlent le hindi mais n’hésitent pas à employer localement un des 1 600 dialectes recensés dans tout le sous-continent indien — le sous-continent comprend huit pays : Inde, Népal, Bhoutan, Bangladesh, Pakistan, Afghanistan, Maldives, Sri Lanka). Descendants des tribus d’Asie centrale qui envahirent la région vers le ve siècle, ils ont fini par s’intégrer aux sociétés hindoues locales en fonction de leur rang respectif. Les chefs et les nobles s’assimilèrent à la caste des kshatriyas (guerriers) et les sujets, inférieurs à la classe des sudras (agriculteurs). Depuis l’indépendance en 1947 et la création de l’État du Rajasthan l’année suivante, les uns ont reçu des postes de gouverneurs ou de hauts fonctionnaires, les autres ont attendu mon passage pour me montrer leurs troupeaux de moutons ou m’inviter dans un cercle de conversation improvisé et me questionner — dans un bricolage d’anglais, de gestes éloquents et d’expression du visage au lexique universel — sur ce que je sais du reste du monde.
Pas question de traverser l’Inde sans s’interroger sur t2 la mosaïque de religions posées en vrac qui la constelle. Ce n’est pas si compliqué : près de 80 % des Indiens sont hindouistes, la deuxième religion, c’est l’islam avec 100 millions de fidèles (14 % de la in population), pour le reste on compte des bouddhistes, (i) des jainistes, des sikhs, des zoroastriens, auxquels –0 s’ajoutent des minorités chrétiennes et juives.
En revanche, pour qui veut s’initier aux subtilités a) d’une de ces pratiques, de ses codes ou de son vocabulaire, une vie bien remplie ne lui suffira sans doute pas, à tel point que chacun propose de continuer le chemin dans l’au-delà. Évidemment, ça se mérite ! En ce qui concerne la réincarnation (hindouisme, bouddhisme, jaïnisme), les actes de l’esprit, la parole et le corps produisent des particules de matières infra-atomiques, c’est ce qu’on appelle le karma. Celui-ci, consécutivement à sa petite taille, est très susceptible et la moindre petite contrariété (infra-contrariété ?) pourrait contrarier vos projets pour la suite, après votre mort terrestre. Le karma est très sensible à la violence par exemple, certains adeptes les plus radicaux se voilent la bouche pour ne pas avaler d’insectes par inadvertance et essuient délicatement l’emplacement où ils prévoient de s’asseoir pour éviter un génocide de micro-organismes.
- les Jaïna et les temples de Delwara
Au nombre de trois millions, la communauté des Jaïna a une influence en Inde due à son passé, mais aussi à son rôle actuel au sein de la République indienne. Relativement aisés, agriculteurs, commerçants, industriels ou hommes d’affaires, installés dans tous les grands centres, les Jaïna consacrent une forte part de leurs richesses à des oeuvres d’entraide, à l’instruction de leurs membres et à la construction de temples.
La tradition dont les Jaïna se réclament remonte à la moitié du premier millénaire av. J.-C Ils firent élever, sur le Mont Abu, les deux temples de Delwara, en marbre blanc délicatement poli et ciselé : le temple Vimala Vasahi (1031-1043) consacré au premier prophète, Adinath, et le temple louna Vasahi (1230) dédié à Neminathe, le vingt-deuxième Tirthankara.
Plus modestement, la plupart des initiés se contentent de respecter au mieux les trois enseignements : une foi juste, une connaissance juste et un comportement juste. Beaucoup d’entre nous n’auront pas besoin de se faire immoler dans le Gange, c’est déjà trop tard.
Pour percevoir d’autres subtilités, rien ne vaut une visite au Jaya Sthamba, temple de neuf étages érigé sur le mont Abu. C’est dans l’art indien traditionnel que l’on peut repérer (avec l’aide d’un guide ou de solides lectures) toutes les subtilités des conceptions philosophiques des écrits fondateurs :
fusion de la chair et de l’esprit, symbolisme complexe des ornementations qui figurent le temps comme la matrice de l’éternité ou la silhouette féminine comme l’expression du mystère du sexe et de la création ».
Tout cela est bien complexe, ce que je ressens pendant la visite, c’est surtout l’énergie, le rythme et la volupté féconde de ces sculptures humaines ou géométriques. On comprend mieux pourquoi la conception du monde promue par les anciens bouddhistes et jàinistes ait essaimé à travers toute l’Asie comme un fleuve en crue dans lequel on a envie de se laisser emporter.
le temple de Raknapur
sur la route entre Udaipur et le mont Abu •
- La route maritime de la soie comme autre approche d’une photographie humaniste
Dès le Moyen Âge, l’océan Indien et le golfe de Bengale étaient sillonnés d’embarcations de marchands en provenance d’Arabie ou plus loin encore de l’Égypte via la mer Rouge.
Ils profitaient des vents de la mousson pour venir quérir des h 4* e étoffes de coton, des épices, des drogues, des médicaments, de la porcelaine et des produits manufacturés comme certaines r armes qui permettaient en outre de faire un peu de brigandage en chemin. Pendant un voyage de près de trois mois, il faut bien s’occuper un peu.
J’ai le sentiment que, plus j’essaye de comprendre, plus ça se complique. Un petit tour en ville me détendra, encore que pour se détendre ici il faille s’accommoder des 43 000 personnes au mètre carré qui tentent de faire la même chose et d’un trafic dantesque. Bombay est sans doute la ville la plus densément peuplée du monde, à toute heure du jour, c’est comme le métro de Paris aux heures de pointe.
Les Portugais l’avaient baptisée Bom Bahia (< la belle baie ») et profitaient de l’accueil (z5 douillet de ce qui n’était qu’un village de 1-1 pêcheurs, les Anglais en ont fait un comptoir et y ont installé le siège de la Compagnie anglaise des Indes orientales. Depuis, on bétonne à tout va et les Indiens, du plus nanti au plus fauché, s’y sont donné rendez-vous.
Bombay a récemment été rebaptisée Mumbai : volonté de changement, de tendre vers l’avant, la ville voudrait jouer dans la cour des grands et devenir par son dynamisme commercial une sorte de Singapour indien. Pourquoi pas ? Une partie du potentiel est là. Mais pour l’instant, Bombay reste une ville duelle d’un côté, cité portuaire tournée vers le commerce international avec ses activités administratives et financières ; de l’autre, un entassement humain livré à la survie où règne une économie qui ne s’étudie pas dans les livres. À proximité des buildings ultra-modernes, dix millions de personnes vivent dans le plus gigantesque bidonville du monde. À Dharavie, bidonville réputé qui semble s’étaler à l’infini entre deux voies de chemin de fer, pendant la période qui précède la mousson et où les températures dépassent largement les quarante degrés, je circule avec un foulard sur la bouche et le nez : une puanteur de boue et de charogne, d’eau croupie, relayée par celles des tanneries de cuir installées non loin. Un effluve nauséeux de matière fécale, de cimetière vivant, catacombes bourdonnant d’une ville submergée par tous ceux qui ont fui la misère rurale, abandonnant la ruralité des États voisins du Maharashtra dans l’espoir d’une vie meilleure. C’est sûr, les gens qui squattent ces abris de tôle et cohabitent avec les rats et les corbeaux omniprésents ne le font pas pour entendre la poésie des averses de mousson crépiter sur le toit. Quoi qu’en dise mon hôte navigateur, il faut vraiment avoir crevé de faim ailleurs pour supporter pareilles conditions.
« Voyager, c’est demander à la distance ce que le temps ne peut nous donner que peu à peu » écrivait Paul Morand. En Inde, sortis des villes, la léthargie ambiante donne parfois l’impression de conjuguer les deux. Le bus des Compagnies publiques indiennes brinquebale et se traîne laborieusement, casse son rythme par des arrêts intempestifs et les kilomètres s’égrènent avec une lenteur qui exaspère le voyageur occidental que je suis. Les Indiens ont-ils inventé le yoga pour supporter la lenteur ou inventé la lenteur pour tester les limites du yoga ? Je sens que mes chakras se referment et je mobilise toute mon énergie pour rester cool.
L’état de la route est identique à celui des sièges et un nid de poule mal négocié par le chauffeur fait basculer l’impressionnant cubage de matelas que nous transportions sur le toit. Aucun dégât, mais le nouveau ficelage de l’ensemble stimule les compétences des autres voyageurs, Pratiquement tout le monde est monté sur la galerie et le moindre noeud donne lieu à des discussions aimables et argumentées qui repoussent encore un pe plus les frontières de l’espace-temp
jayanaeir fut la capitale de l’un des plus vaste, empires hindous l’histoire de
Fondée en 1356, elle atteignit son apogée sous le régne de Krishna Devanaya (1509-1520 qui contrôlait toute la région. La prospérité de la ville provenait du commerce des épices au sud et de l’industrie du coton. L’empire fut anéanti en 1565, date à laquelle la ville fut mise à sac. Aujourd’hui, ces ruines constituent l’un des sites les plus fascinants, dans un décor insolite et grandiose, parsemé de rochers aux formes rondes.
fils et la remplaça par la tête du premier animal rencontré. Ganesh est la divinité des arts, de la connaissance et des sciences. On l’honore toujours avant un spectacle.
Ganesh, omniprésent • • Ganesh, le dieu à tête d’éléphant, est le fils de Shiva et de Parvati.
C’est probablement Vielle la plus populaire du panthéon hindou.
L’arrivée à Hampi me le confirme : cette fois, c’est sûr, le temps s’est arrêté. Pendant cinq siècles, cette ville est restée figée, comme morte. Ancienne capitale du royaume de Vijayanagar qui dominait tout le sud de l’Inde, elle a été vidée de ses occupants par des envahisseurs musulmans. Seuls des pèlerins hindous ont continué à fréquenter ses temples jus?
qu’à une récente réincarnation en ville touristique et un nouvel essor. C’est ici que l’on trouve la plus grande quantité de représentations de Ganesh (dieu à tête d’éléphant) ou de temples dédiés à Vishnu (la trinité hindoue est composée de trois membres : Brahma, Vishnu et Shiva. Brahma est né d’un lotus surgit du nombril de Vishnu). Hampi, ce sont trente kilomètres carrés de temples, de ruines et d’énormes rochers posés çà et là comme de gros animaux endormis au milieu desquels passe une rivière placide et lustrée comme un chrome.
D’autres bêtes, bien vivantes celles-là, cavalent en tout sens et apportent un peu d’activité dans cette chaleur accablante mais moins humide qu’à Bombay ; ce sont des singes macaques, me semble-t-il — on les appelle ici des black-nose. Ils sont partout, grimpent sur les toits, grouillent sous les rochers, se suspendent aux arbres, s’épouillent ou forniquent sur les multiples statues de divinités. Les singes bénéficient de la croyance hindoue selon laquelle tout être vivant porte une parcelle de divinité et ne peut donc être tué. Fléau sacré et surtout choyé par cette surenchère d’attentions, ils se comportent en enfants gâtés et s’autorisent toutes les exactions : vol de sacs à main, d’appareils photo, de couvre-tête,projection de pierres… (On cite aussi la défenes tration d’un nouveau-né arraché à sa mère.) Ils ne risquent au pire que d’être ramenés dans la jungle de bambous et d’arbres à palmes où les guépards qui profitent du même statut risquent de leur réserver un accueil moins aimable.
Les apparences sont trompeuses, l’Inde n’est pas un pays qui somnole. À l’opposé de nos philosophies matérialistes, d’une recherche systématique de la raison ou de preuves scientifiques qui caractérisent la science occidentale, la pensée orientale donne l’impression de privilégier le travail sur soi, la méditation transcendantale et la sagesse. On l’a cru contemplative et inapte au raisonnement logique, c’était oublier que, dès l’Antiquité, les Indiens avaient la maîtrise du système décimal et utilisaient le zéro. À l’heure de l’effondrement de l’Empire romain, les performances de l’Orient et de (13 l’Inde en particulier étaient bien supérieures r.–1 aux nôtres dans des domaines aussi vastes que la botanique, l’astronomie, la minéralogie ou l’agriculture. Le paradoxe veut que le compas de marine inventé par les Chinois et introduit en Europe via l’Inde, en permettant.
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